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LES ECHOS – 28/02/2017

Actus franciliennes

 

::: ECONOMIE

LES ECHOS – 28/02/2017

Le nouveau portrait-robot du travailleur indépendant

Le nombre de travailleurs indépendants a été divisé par deux depuis les années 1970, du fait notamment de l’essor de la grande distribution et la disparition des petites exploitations agricoles. Les autoentrepreneurs et l’émergence des plates-formes collaboratives ont fait naître une nouvelle génération.

Voici le portrait-robot du travailleur indépendant d’aujourd’hui. C’est un homme (à 66 %), âgé de 46 ans, diplômé, dans le secteur des services. Si on exclut du compte les autoentrepreneurs et les agriculteurs, il exerce de plus en plus fréquemment sous forme sociétaire (45 %) et il gagne 38.280 euros par an. Une fois sur dix ses revenus sont nuls ou négatifs. Il prendra sa retraite après avoir travaillé quelques mois de plus qu’un salarié, pour une pension de 1.170 euros par mois (contre 1.280 euros en moyenne pour un salarié).

Dans un rapport publié récemment sur les 2,8 millions de travailleurs indépendants que compte la France, le Haut Conseil pour le financement de la protection sociale (HCFiPS) éclaire la révolution tranquille en cours depuis quarante ans. En 1970, deux emplois sur dix (20,8 %) étaient non-salariés, contre un sur dix en 2014 (10,6 %). Le point bas a été atteint au début des années 2000, avec seulement 2,2 millions d’indépendants. Depuis 2003, ils sont 500.000 de plus.

Remodelage de l’économie

Le recul des indépendants est allé de pair avec le remodelage de l’économie. Leur nombre dans l’agriculture a été divisé par cinq, fondant avec le nombre d’exploitations et la croissance du salariat. Les agriculteurs sont encore souvent indépendants, à 63 %. Mais ils ne pèsent plus que 15 % de l’emploi non-salarié, alors qu’ils formaient la moitié du bataillon il y a vingt-cinq ans.

Après l’exode rural, l’autre grand moteur du changement a été la mue du secteur tertiaire : les commerçants ont été remplacés par des chefs de rayon et des caissiers de supermarché. Résultat, seuls 9 % des travailleurs du tertiaire sont indépendants aujourd’hui contre quasiment le double en 1970.

On note également l’essor de l’exercice sociétaire. Plus de la moitié des agriculteurs font désormais ce choix, en créant une EARL ou un GAEC. Les médecins libéraux se regroupent aussi, avec une multiplication par treize du nombre de sociétés d’exercice libéral entre 2000 et 2010. Ces créations d’entreprises favorisent le salariat, parfois même pour le créateur lui-même. En 2011, on estimait ainsi que 168.000 indépendants de fait pointaient au régime général : dirigeants de SA ou de SAS, gérants minoritaires de SARL, gérants non associés de SNC, dirigeants de GIE.

Un million d’autoentrepreneurs

Si les indépendants reviennent en grâce, c’est à cause de la crise, qui a forcé nombre de Français à créer leur propre emploi, et de l’apparition en 2009 du statut d’autoentrepreneur. Il sont un million à bénéficier de ce régime social simplifié à condition de ne pas engranger trop de chiffre d’affaires. Ceux qui sont actifs gagnent seulement 5.280 euros par an. Par conséquent, en 2006-2012, le revenu moyen des indépendants a baissé de 15 % en euros constants en moyenne. Hors auto-entrepreneurs, il a progressé de 1,3 %.

Enfin, l’arrivée des plates-formes collaboratives a braqué le projecteur sur les nouvelles formes d’emploi précaire ou à la lisière du salariat. Le nombre de travailleurs affiliés aux plateformes « pourrait être supérieur à la seule estimation aujourd’hui disponible de 200.000 », selon le HCFiPS. Ce dernier relève toutefois que le non-salariat n’a pas été le seul à muter. Le salariat a crû, mais en tolérant une proportion croissante de contrats à durée déterminée, de contrats aidés, d’intérim et d’apprentissage  : de 1982 à 2014, la part de ces emplois fragiles est passée de 5 % à 12 % du total.

Solveig Godeluck

 

 

LES ECHOS – 28/02/2017

Les risques de l’extension de l’assurance-chômage

Pour éviter les effets d’aubaine du projet de Macron, une durée minimale d’activité serait imposée aux indépendants, ainsi qu’un plancher de rémunération.

« Aller vers une assurance-chômage universelle… » Cette proposition très populaire d’Emmanuel Macron repose sur l’idée qu’il faut supprimer les différences de traitement selon le statut des actifs face au risque de chômage. Comment ne pas penser aux chauffeurs de VTC, dont certains se retrouvent coincés avec une rémunération insuffisante car sans revenu de remplacement en cas d’abandon de leur activité ? La proposition du président d’En marche peut séduire à l’heure de l’ubérisation : elle ouvrirait droit pour les VTC à une indemnisation alignée sur celle des salariés. Celle-ci serait, en effet, étendue aux travailleurs indépendants, aux professions libérales et aux entrepreneurs. Et pour zéro euro. Comme les salariés, les non-salariés ne paieraient pas de cotisations, les contributions de tous les actifs étant transférées sur la CSG, précise un proche d’Emmanuel Macron.

Si on ne chiffre pas le surcoût du dispositif, dans son entourage, on souligne que, comme l’élargissement de l’accès à l’assurance-chômage aux démissions, son extension aux actifs non assurés aujourd’hui par l’Unédic serait financée par les économies générées par l’amélioration de l’efficacité du régime, et en particulier du contrôle des chômeurs.

Une question d’équité

Le dispositif encore en cours d’élaboration suscite cependant une interrogation en termes d’équité côté financement entre les dirigeants et leurs salariés. Car, a priori, seules les rémunérations des seconds donneraient lieu au versement de la cotisation patronale par l’entreprise que compte maintenir Emmanuel Macron en complément de la CSG. Alors même qu’aujourd’hui, assurer des dirigeants contre le risque de perte d’emploi coûte entre 3 % et 4,28 % de la rémunération brute via la GSC, le régime facultatif qu’ont créé les organisations patronales en 1979 (« Les Echos » du 27 février). En Suède, où les travailleurs non salariés sont aussi couverts par un régime de base d’assurance-chômage obligatoire et où il n’y a pas de cotisation salariale pour financer le régime des salariés, les non-salariés paient une cotisation. A noter qu’elle est bien plus faible que celle des entreprises pour leurs salariés (0,10 % contre 2,64 %).

En l’absence de contribution directe des non-salariés – comme des salariés – au financement des prestations, l’instauration d’un régime universel d’assurance-chômage comporte par ailleurs un risque d’effet d’aubaine. « L’élargissement aux non-salariés, c’est un peu comme si vous pouviez assurer votre voiture gratuitement puis y mettre le feu et être indemnisé », explique un fin connaisseur de l’assurance-chômage. Cet « aléa moral » concerne cette fois-ci plutôt les entrepreneurs individuels que les chefs d’entreprise employant des salariés, dont on imagine mal qu’ils mettent la clef sous la porte sans raison majeure. Pour éviter cet effet d’aubaine, il est prévu d’imposer aux travailleurs indépendants une durée minimale d’activité assortie d’un plancher de rémunération dont les niveaux sont en cours d’arbitrage, souligne-t-on dans l’entourage d’Emmanuel Macron.

Leïla de Comarmond

 

 

LA TRIBUNE – 28/02/2017

L’emploi intérimaire continue de progresser

 

L’emploi intérimaire continue de progresser en janvier avec 8% d’intérimaires de plus qu’il y a un an.

Mais il n’est pas certain que ce mouvement conduise à terme à de l’emploi stable.

 

Sur un an, le nombre d’intérimaires a progressé de 8% en janvier. Tous les secteurs sont concernés.

Dans l’intérim, la hausse de l’emploi continue en janvier, même si cette progression marque un peu le pas. D’après le dernier baromètre de Prism’emploi – l’organisation professionnelle qui regroupe les entreprises de l’intérim-  après une progression de 13,3% en décembre (sur une année), la croissance de l’emploi intérimaire est demeurée solide en janvier avec une hausse de 8%. Un signe supplémentaire que la situation du marché du travail connaît un lent redressement.

Davantage d’intérimaires dans tous les secteurs

Signe encourageant, tous les secteurs sont orientés à la hausse: la palme revient à l’industrie qui voit le nombre de ses intérimaire croître de 9,4%. Dans les transports, la hausse atteint 8,8% (après 14, 3% en décembre). Dans le BTP et les services, les progressions sont respectivement de 7,6% et 6,4%. Enfin, le commerce enregistre une hausse plus modeste de 3,1%.

S’agissant des métiers, ce sont les plus qualifiés qui soutiennent la croissance: les cadres et les professions intérimaires (11,8%) et les ouvriers qualifiés (11,3%).

Bon pour l’emploi durable?

Certes, si l’on continue de considérer que l’intérim constitue un indicateur avancé de l’emploi, cette bonne santé de ce secteur peut alors en effet être considérée comme une bonne nouvelle. A terme, en effet, si la croissance le permet, cet emploi intérimaire est susceptible de se transformer en emploi stable.

Mais il n’est plus certain que cette thèse soit encore évidente. La généralisation des contrats très courts et l’explosion du nombre des CDD semblent constituer un phénomène en phase de  pérennisation; un nouveau mode de gestion des entreprises qui ne veulent pas prendre le risque de recruter sous des contrats durables. Dans ce contexte, il n’est donc pas certain, à terme, même en cas de bonne tenue de la croissance, que l’emploi intérimaire se transforme en emploi durable.

Jean-Christophe Chanut  

 

::: ENTREPRISES

LE MONDE – 28/02/2017

La SNCF est revenue aux bénéfices en 2016 mais son modèle économique reste fragile

La rentabilité du TGV continue de baisser. La dette a encore augmenté de 3 milliards d’euros en 2016

Comment va la SNCF ? En apparence mieux qu’il y a un an. La compagnie ferroviaire nationale a présenté, lundi 27 février, des comptes 2016 bénéficiaires de 567 millions d’euros, à comparer avec la perte abyssale de 12 milliards qui avait marqué l’année 2015. L’entreprise publique avait dû intégrer dans son bilan une dépréciation d’actifs, à cause, en particulier, de la dégradation du réseau ferré français.

A première vue, ces mauvais comptes appartiennent au passé. Le chiffre d’affaires de 32,2 milliards d’euros pour 2016 ressort en croissance de 2,8 %, le nombre de voyageurs transportés par toutes les sociétés du groupe a dépassé pour la première fois les 13,5 millions de passagers transportés.

Le développement existe donc et il est d’autant plus méritoire qu’il intervient dans le contexte d’une année difficile, marquée par le contrecoup des attentats, la grève liée à l’organisation du travail (jusqu’à 80 % de grévistes de fin mai à début juin), les inondations catastrophiques du printemps et une récolte céréalière historiquement faible.

La SNCF estime à 700 millions d’euros le manque à gagner dû à ces événements. Dans un tel contexte, réaliser un demi-milliard de profits est une jolie performance. « Dans un environnement difficile, 2016 marque le retour d’une croissance organique et d’un chiffre d’affaires rentable », souligne Frédéric Saint-Geours, président du conseil de surveillance du groupe.

Pourtant, à y regarder de près, les comptes publiés ne sont pas si rassurants. A commencer par la rentabilité de SNCF Mobilités. Cette branche constitue le cœur du groupe (le transport par train). Elle génère l’essentiel du chiffre d’affaires et les plus substantiels profits. Or, la marge opérationnelle de Mobilités est en baisse continue. Elle est passée de 9,2 % du chiffre d’affaires en 2013, à 7,5 % l’an dernier.

« Réduire les coûts pour faire baisser les prix »

« Il nous manque deux points de marge, reconnaît Guillaume Pepy, président du directoire de la SNCF. Il n’y a qu’une façon de les regagner : réduire les coûts pour faire baisser les prix. » Le patron des cheminots met en avant les efforts de productivité accomplis cette année : optimisation des achats, lutte contre la fraude, baisse des coûts de production et de structure. Au total, SNCF Mobilités et SNCF Réseau (qui gère l’infrastructure ferroviaire) ont réalisé des gains de productivité de 825 millions d’euros en 2016, supérieurs aux objectifs de 750 millions. Et sans les événements imprévus de 2016, la rentabilité se serait améliorée, assure la direction.

Le souci, c’est que morosité touristique, mouvements sociaux et rails inondés n’expliquent pas tout. Il y a un problème structurel et il porte un nom : le modèle TGV. Le vaisseau amiral du groupe public prend l’eau. En témoignent les résultats pour le moins médiocres de Voyage SNCF – autrement dit tout ce qui n’est pas trains régionaux et trains de banlieue –, dont la marge opérationnelle s’est effondrée de 11,7 % en 2015 à 8,5 % l’an dernier. La baisse du trafic TGV a atteint environ 3 % en 2016. Sur les 20 millions de « trains-kilomètres » manquants en 2016 par rapport à 2015, 10 millions sont imputables aux événements, le reste à des difficultés structurelles.

« Remise à plat du modèle TGV »

Le voyage en train, avec son fer de lance, la grande vitesse, doit faire face à la concurrence agressive de nouveaux modes à très bas coût : covoiturage, aérien low cost, cars Macron. Résultat : pour ne pas se laisser distancer, la SNCF multiplie les offres à prix attractifs. Et avec succès. Si on gomme l’effet grèves, le TGV a attiré plus de voyageurs en 2016 qu’en 2015 (+ 1,9 %), grâce à ses nouvelles propositions tarifaires comme TGV Pop (billets à bas prix de dernière minute). Plus globalement, l’ensemble des offres Oui (Ouigo, Ouibus, Ouicar) a généré 76 % de voyageurs supplémentaires en 2016. L’offensive commerciale maintient les parts de marché… mais au détriment de la rentabilité. Une vraie quadrature du cercle financier.

Et il y a plus grave. Les nouvelles lignes TGV vont non seulement être beaucoup moins rentables, mais elles pourraient se révéler déficitaires. « Certains péages ne sont plus soutenables, assure M. Pepy. Nous avons dû inscrire au budget 2017 une perte de 90 millions d’euros sur la ligne à grande vitesse Sud Europe Atlantique pour une demi-année d’exploitation. » En cause, le modèle économique (des partenariats public-privé) qui implique un retour sur investissement mettant sous pression financière la SNCF. Pour Guillaume Pepy, « une remise à plat du modèle TGV » paraît inévitable.

Ce déclin est d’autant plus problématique que la SNCF s’est lancée dans un vaste programme destiné à redonner du lustre aux voies ferrées françaises. « Notre priorité stratégique, c’est l’investissement dans la rénovation du réseau ferré structurant, le plus circulé, précise Patrick Jeantet, PDG de SNCF Réseau et vice-président du directoire du groupe. Il a été le grand oublié de ces dernières années, délaissé au profit des lignes à grande vitesse. » Sur les 8,6 milliards investis par l’entreprise en 2016, 5,2 l’ont été par SNCF Réseau, dont près de 3 milliards pour la seule rénovation.

Quelques vraies bonnes nouvelles

Tout ceci se fait dans un contexte financier ultra-contraint. La dette de la partie Réseau a encore augmenté de 2,68 milliards d’euros. Elle atteignait, au 1er janvier, 44,94 milliards. La stratégie de désendettement n’est pas encore en place : elle passe en théorie par une règle d’or qui interdira à l’entreprise de se lancer dans un projet non financé au préalable, et par une amélioration de la performance de SNCF Réseau censée rapporter 500 millions d’euros par an dès 2020 et 1,2 milliard à terme en 2027.

On n’y est pas encore. En 2016, le plan de performance de la branche Réseau a généré 248 millions d’euros d’économies. Surtout, la SNCF a encore dû financer elle-même un certain nombre de projets, généralement sous pression politique, comme l’illustre l’affaire Alstom-Belfort.

Il y a quand même quelques vraies bonnes nouvelles. On les déniche dans les résultats des filiales opérant à l’international. L’opérateur de transport public Keolis, qui a franchi le seuil de 3 milliards de voyageurs en 2016, améliore sa marge opérationnelle de 13 %.

Encore mieux : SNCF Logistics apporte 200 millions d’euros de rentabilité opérationnelle supplémentaire au groupe, portée par les performances de Geodis en Europe et en Amérique du Nord. C’est précisément une acquisition de Geodis aux Etats-Unis, qui permet au chiffre d’affaires du groupe d’apparaître en hausse. Sans cela, les ventes auraient reculé de 1,5 %. Malgré les difficultés du fret en France, la logistique apporte désormais à la SNCF un tiers de son activité.

Éric Béziat

 

 

LES ECHOS – 28/02/2017

Le groupe Eram veut vendre Tati, le pionnier des bas prix

Le spécialiste des vêtements à petits prix a creusé ses pertes en 2016. 1.720 emplois sont en jeu.

Tati, la célèbre enseigne pionnière du discount textile, est à vendre. Son propriétaire, le groupe Eram, a décidé de céder ce spécialiste des vêtements à petits prix, fondé il y a près de 70 ans, et qui n’a cessé de creuser ses pertes ces dernières années, comme l’a révélé le site boutique2mode.com. Un mandat a été confié a une banque d’affaires pour trouver un repreneur à Agora- la filiale du groupe Eram dans laquelle est logé Tati- et éviter un drame social. Ce pôle discount, qui compte aussi les marques Giga Store et Fabio Lucci, également en vente, regroupe pas moins de 1.720 salariés et 140 magasins. Une nouvelle menace, après la faillite du géant Vivarte.

Depuis la crise de 2008, et les difficultés persistantes du marché de l’habillement, Tati a vu les nuages s’accumuler. L’arrivée en France de nouveaux concurrents, avec des prix cassés, et des produits plus attractifs, comme Primark, a aussi précipité la chute. Sans parler l’an dernier, des caprices de la météo, conjugués aux menaces d’attentat.

Une image vieillissante

Agora, dont l’enseigne au vichy rose est la principale contributrice, a ainsi vu, selon nos informations, sa perte nette s’alourdir à 54 millions d’euros en 2016 (contre près de 37 millions en 2015) pour 346 millions d’euros de ventes. Le groupe Eram, connu aussi pour ses marques Gemo, Mellow Yellow ou Heyraud (1,5 milliard d’euros de chiffre d’affaires) a donc décidé de s’en séparer. L’entreprise familiale, toujours contrôlée par la famille Biotteau, avait déjà mandaté une banque d’affaires en 2015. Mais la seule offre provenant d’un fonds avec à la clef de lourdes conséquences sur l’emploi, avait fait reculer son propriétaire. Finalement, le processus a été relancé l’an dernier pour l’instant sans résultat.

Tati, créée en 1948 à Barbès par Jules Ouaki, est restée une enseigne mythique, mais avec une image vieillissante face à des enseignes de mode a bas prix comme H&M ou Zara. Eram avait décidé de la relancer en créant ses propres collections, alors que l’enseigne avait bâti son succès sur le déstockage, avec des articles pas chers présentés en vrac. Elle a conservé une offre large de vêtements et d’accessoires pour hommes, femmes et enfants. ainsi qu’un rayon mariage, ou encore des produits pour la maison. Ses prix étaient restés abordables, avec un tarif moyen de 5 euros. Le groupe Eram n’avait pas hésité a investir en ouvrant une centaine de magasins en dix ans, portant le réseau à 130 points de vente. Le plus grand Tati de France étant inauguré en 2014 à Créteil. Tati avait aussi fait le pari d’internet pour se développer.

Ce come back avait commencé à porter ses fruits puisque le roi français du « pas cher » avait redressé la situation à partir de 2011, parvenant presque à l’équilibre en 2013, avant de replonger dans le rouge. Pour se relancer, l’enseigne née dans le quartier de Barbès à Paris avait aussi tenté de s’exporter. A partir de 2014, elle avait commencé à ouvrir des points de vente aux Émirats arabes unis, à Bahreïn, en Arabie Saoudite et en Algérie, toujours en visant une clientèle populaire qui avait fait son succès.

Dominique Chapuis

 

 

LE FIGARO – 28/02/2017

Dernière ligne droite pour mettre d’accord distributeurs et fournisseurs

Les traditionnelles négociations commerciales pour les tarifs 2017 se terminent ce mardi soir à minuit. Encore une fois, les industriels ont dénoncé des demandes irraisonnées de la part des grandes enseignes.

La journée s’annonce longue du côté des box de négociations. Si en 2016, industriels et fournisseurs ont eu 24 heures de plus pour boucler les négociations tarifaires, cette année, elles se termineront comme l’exige la loi le 28 février à minuit. Et comme tous les ans depuis une décennie, les industriels ont donné cette année de la voix pour dénoncer un rapport de force inégalitaire face aux géants de la grande distribution regroupés en quatre supercentrales (Système U-Auchan, Casino-Intermarché, Carrefour-Cora et Leclerc), et les 15.000 acteurs de l’agroalimentaire qui maillent la France.

Dans ce traditionnel rapport de force: un mot était sur les lèvres de tous les représentants des industriels: «déflation». Que ce soit chez les 70 géants de la grande distribution regroupés au sein de l’Ilec (Nestlé, Danone, Ferrero, Heineken…), chez les groupes coopératifs (Coop de France), ou encore chez les 15.000 membres de l’Association Nationale des Industries Agroalimentaires (Ania), tous ont dénoncé des demandes systématiques de baisses tarifaires de la part des enseignes. «La négociation ne se fait que sur les prix, et pas sur les produits», déplorait encore lundi midi Dominique Chargé, le président de Coop de France alimentaire, en marge du Salon de l’Agriculture qui se tient actuellement à la Porte de Versailles à Paris.

Flambée des matières premières

Quelques semaines plus tôt, l’Ania avait dénoncé ces mêmes phénomènes, qu’elle estimait d’autant moins légitimes dans un contexte de forte hausse des matières premières (+22% sur le porc depuis un an, +60% sur le saumon, +16% sur l’huile d’olive, +55% sur le beurre…). «À minima, on nous demande de ne passer aucune hausse, mais dans la majorité des cas, ce sont des demandes de déflation, explique Jean-Philippe Girard. Certaines enseignes veulent changer, et être plus respectueuses, mais dans les faits, c’est toujours aussi tendu». Le dirigeant dénonce notamment des pénalités de retard de plus en plus systématiques et «pointilleuses». Du côté de l’Ilec, on souligne aussi certains comportements plus vertueux, notamment dans le moindre recours aux menaces de déréférencements sauvages, mais aussi la sourde oreille faite aux demandes de hausses tarifaires. Un constat corroboré par une récente étude de Coop de France (40% de l’agroalimentaire français) dans laquelle sur les 80% de répondants concernés par la hausse des matières premières, seuls 10% ont eu un accompagnement tarifaire de la part de leur client distributeur.

Au final, Coop de France estime que sur les grandes marques, les baisses tarifaires exigées allaient encore, 48 heures avant la fin des négociations, de 2 à 4%. Inacceptable alors que les prix devraient en moyenne être augmentés de 5% pour compenser l’impact des matières premières, selon cette dernière. Alors qu’après Carrefour, la répression des fraudes est sur le point d’envoyer une assignation à une enseigne pour des pratiques commerciales frauduleuses pendant les négociations 2016, les deux prochaines nuits devraient être longues.

Olivia Détroyat

 

 

LE PARISIEN – 28/02/2017

Airbnb veut installer une limite automatique à 120 nuitées à Paris

 

Emmanuel Marill explique qu’« un hôte loue 33 nuitées par an en moyenne dans la capitale »en utilisant Airbnb.

Emmanuel Marill, le nouveau directeur général de la plate-forme de location de logements en France, propose un nouvel outil pour éviter les abus dans la capitale. 

Emmanuel Marilla pris les commandes d’Airbnb France en septembre. Avec 8 millions d’utilisateurs dans l’Hexagone, la plate-forme de location de logements entre particuliers suscite les critiques des hôteliers, des syndics de copropriété ou même du fisc qui lui reprochent entre autres de fausser la concurrence et d’encourager la fraude. Le nouveau patron s’en défend et annonce en exclusivité une proposition pour améliorer la réglementation.

Ces derniers mois, Airbnb semble jouer au bon élève pour apaiser les tensions…

EMMANUEL MARILL.Nous avons un rôle à jouer pour améliorer la législation. Nous l’avons fait en 2015, lorsqu’on s’est mis à collecter la taxe de séjour pour la mairie de Paris. D’ici la fin de l’année, nous le ferons pour toutes les villes (lire ci-dessous). Aujourd’hui, nous avons une nouvelle proposition pour limiter la fraude.

Que suggérez-vous ?

Nous voulons installer sur notre plate-forme une limite automatique à 120 nuitées (le maximum légal) pour les 50 000 hôtes parisiens. S’ils ont des autorisations pour louer davantage — parce que ce sont des professionnels, qu’ils sont mutés pendant six mois, qu’ils ont un bail touristique… —, ils pourront décocher sur l’honneur cette limite automatique.

Quel est l’objectif ?

La mairie de Paris dispose de 25 agents pour réaliser des contrôles. Malgré les fantasmes — un hôte loue 33 nuitées par an en moyenne dans la capitale –, nous proposons ce dispositif pour cibler les contrôles. Nous pourrions transmettre à la mairie les contacts des hôtes qui louent plus de 120 nuits afin d’affiner les recherches de fraudes.

Quand pensez-vous pouvoir lancer cette option ?

La balle est dans le camp de la Ville de Paris. Nous discutons depuis des semaines. En cas d’accord, il nous faudra environ trois mois pour démarrer.

Comptez-vous le déployer partout en France ?

Non. il est adapté à Paris où il existe de grands débats sur le logement.

Les syndics s’agacent des nuisances des touristes Airbnb. Que répondez-vous ?

Le nombre de plaintes pour tapage nocturne lié à Airbnb reste infime. Cela dit, nous avons créé un « outil de voisinage » pour signaler qu’il y a des nuisances dans une copropriété. Et nous expliquons régulièrement à nos voyageurs étrangers qu’à Paris, les cloisons sont fines, les parquets grincent…

Airbnb pratique l’optimisation fiscale et paie peu d’impôts en France. Comprenez-vous que cette attitude puisse choquer ?

Je peux le comprendre. Mais c’est une vision biaisée car sur une nuitée à 100 €, 97 € restent dans la poche de l’hôte français. Et nous payons des millions d’euros de TVA. Enfin, depuis deux ans, nous aidons nos hôtes à déclarer leurs revenus en leur envoyant un rappel fiscal.

En 2019, les données fiscales seront envoyées par les plates-formes aux impôts. Qu’en pensez-vous ?

La loi a été votée et nous restons en contact avec Bercy. Après, est-ce que nos hôtes ont intérêt à ce que nous transmettions leurs données directement à l’administration fiscale ? C’est une vraie question. Et je m’interroge aussi sur la dimension égalitaire de cette nouvelle loi…

C’est-à-dire ?

Si on étouffe les plates-formes avec trop de réglementations, on risque de voir les hôtes basculer vers des plates-formes de petites annonces où il y a moins de garanties que chez nous. Et plus de fraudes !

18 000 villes vont percevoir la taxe de séjour d’Airbnb

C’est un petit effort pour Airbnb. Mais une grande victoire pour les villes. Après Paris et Chamonix en 2015, 19 communes se sont partagées, en 2016, 7,3 M€ de taxe de séjour collectée par la plate-forme de location de logements Airbnb auprès de leurs hôtes. D’ici le printemps, l’ensemble des 18 000 villes qui perçoivent cette taxe sur leur territoire rejoindra le club des bénéficiaires.

« Les sommes ne sont pas colossales, autour de 9 000 € par an, prévient Laurent Bellanger, le directeur général des services de Deauville (Calvados). Mais la démarche est hautement symbolique ! » Idem à La Baule (Loire-Atlantique), où la taxe de séjour perçue auprès des voyageurs Airbnb est estimée à 20 000 €. « Mais cela fait des mois que nous relancions la plate-forme, grogne Xavier de Zuchowicz, l’adjoint au maire chargé du commerce. Pour nous, c’est un signal fort à envoyer à nos hôteliers et campings qui dénonçaient à juste titre une concurrence déloyale. »

Aurélie Lebelle, Matthieu Pelloli et Odile Plichon

 

 

LE FIGARO – 28/02/2017

Emploi : les énergies renouvelables ne sont pas l’eldorado annoncé

INFOGRAPHIE – Pas de doute, la transition écologique est en route, mais les créations d’emplois restent plutôt modérées.

La transition énergétique, quelle transition énergétique? Pour de nombreux observateurs, c’est une véritable révolution qui se dessine, portée à la fois par l’héritage de la COP21 et la prise en compte de l’urgence climatique. Deux vecteurs en particulier contribuent à ce mouvement: d’une part, l’essor des énergies renouvelables, d’autre part, le développement de l’efficacité énergétique (pilotage des installations, mobilité électrique, rénovation de l’habitat, transformation digitale…). Ces mutations exerceraient un très fort impact sur l’emploi: selon l’Irena – l’Agence internationale des énergies renouvelables -, plus de 8 millions de personnes dans le monde travailleraient déjà dans ce secteur. Et ses projections sont dynamiques, avec le chiffre de 24 millions évoqué à l’horizon de 2030.

À l’échelle – plus modeste – de la France, Ségolène Royal, la ministre de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie, a annoncé que la transition écologique créerait plus de 100.000 emplois sur trois ans. En 2007, le Grenelle de l’environnement annonçait 600.000 postes sur la période 2009-2020. Mais que valent exactement ces estimations ambitieuses? La crédibilité de la croissance verte est au prix de la vérité des chiffres, et de leur décryptage sur le plan opérationnel.

Un bilan nuancé en France

La France n’a pas attendu la loi de transition énergétique (votée en 2015) pour commencer à comptabiliser les emplois dans ce domaine. Dès 2006, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) a démarré un comptage précis. Selon les dernières statistiques, les énergies renouvelables emploient quelque 80.000 personnes contre 59.000 en 2006. À titre de comparaison, le nucléaire recense 220.000 salariés et 174.000 pour le gaz. Le charbon n’a pas disparu de la circulation, avec environ 5000 emplois.

De son côté, l’efficacité énergétique regroupe quelque 230.000 postes (environ 137 000 travaillant sur le résidentiel et 93 000 dans le transport), contre 120.000 dix ans auparavant. «Pour les énergies vertes, autant les emplois liés àl’exploitation progressent régulièrement, autant ceux relevant de l’installation subissent des variations sensibles, explique Jean-Louis Bal, le président du Syndicat des énergies renouvelables, à cela une bonne raison: plus le contexte réglementaire est favorable à la construction de nouvelles infrastructures, plus on embauche. Et le contraire se vérifie de la même manière.»

La filière solaire illustre bien ce phénomène de stop-and-go: au début des années 2010, le moratoire décrété par le gouvernement – c’est-à-dire l’interruption des dispositifs de tarifs de rachat de l’électricité photovoltaïque – a eu «un impact dévastateur» selon les termes de Daniel Bour, le président du groupe Générale du solaire: «On considère que le secteur a perdu près de 60 % de ses effectifs entre 2011 et 2013, passant de 25.000 à 10.000 emplois en moins de deux ans.»

Jean-Louis Bal n’en fait pas mystère: le bilan de l’emploi dans le renouvelable est mitigé, «car nous sommes victimes de trop de freins: à la fois une législation chaotique, des obstacles administratifs pour les projets d’envergure – comme l’implantation des éoliennes offshore au large des côtes françaises, victime d’une avalanche de recours – et une inadéquation entre les objectifs et les moyens à disposition.» La loi d’orientation énergétique prévoit que le renouvelable assure 23 % de la consommation énergétique en France en 2023, mais il peine actuellement à dépasser 17 %.

Dans l’efficacité énergétique, la France a été le premier pays européen à présenter son plan national d’action. C’était au printemps 2014, l’objectif étant de réaliser 20 % d’économies d’énergie d’ici à 2020, conformément à la directive bruxelloise. Certains chantiers sont considérés comme très porteurs, telles la transformation de l’habitat et la révolution des transports. Mais le maquis réglementaire (concernant la première) et les hésitations des industriels empêchent de parler de trajectoire exponentielle en termes d’emplois. Certains groupes, comme Engie (ex-GDF Suez), ont cependant franchi le pas. Celui-ci fédère déjà 100.000 personnes dans l’efficacité énergétique et prévoit de créer 5 700 postes supplémentaires au cours des trois prochaines années.

Une évolution contrastée dans le monde

Le monde vu sous l’angle des emplois de la transition énergétique est presque divisé en deux: les pays en voie de développement se montrent beaucoup plus dynamiques que les économies développées, en raison de leur demande énergétique plus forte et d’une production renouvelable encore plus compétitive par rapport aux énergies traditionnelles. «Notre ambition de doubler nos capacités installées d’énergies renouvelables d’ici à 2030 répond à un besoin essentiel: près de 1,5 milliard d’habitants de la planète n’ont toujours pas accès à l’électricité», illustre Antoine Cahuzac, le directeur général d’EDF Énergies nouvelles (EDF EN). Fin 2016, l’entreprise a inauguré sa plus grande ferme solaire au Chili, l’un des rares pays où l’énergie photovoltaïque ne profite d’aucun mécanisme de soutien.

Les pays émergents disposent aussi de l’avantage de construire pour le reste du monde un grand nombre d’équipements nécessaires à transition énergétique. «Mais il faut sortir ici de l’idée préconçue selon laquelle l’emploi dans le solaire serait exclusivement concentré dans des usines de fabrication de panneaux situées en Chine, souligne Daniel Bour. Ces outils représentent une part de moins en moins importante dans la valeur ajoutée totale d’une centrale solaire. Les emplois de demain sont à créer dans ce qui constitue la véritable bataille des années à venir: la gestion de l’intermittence.»

Dans l’efficacité énergétique, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) souligne que l’effort est encore insuffisant pour «mettre le monde sur les rails d’un système énergétique décarboné». Certes, ses 29 pays membres ont investi quelque 221 milliards d’euros en 2015, en progression de 6 %, mais le dernier rapport de l’agence souligne la nécessité de renforcer les politiques nationales. De son côté, l’Europe table toujours sur 2 millions d’emplois supplémentaires d’ici à 2020.

Une nouvelle carte des investissements

C’est la question qui fâche: la progression des emplois liés à la transition énergétique entraîne-t-elle un recul des postes liés aux énergies traditionnelles? «Le “solde” entre création et destruction d’emplois de valeur associée aux orientations de ce grand mouvement est complexe à mesurer», répond immédiatement Florian Ortega chez Colombus Consulting. Le phénomène est d’autant plus difficile à analyser que la situation actuelle des énergéticiens historiques les encourage plutôt à dégraisser. «En raison des prix bas de l’énergie et des surcapacités résultant de l’essor des énergies renouvelables, le chiffre d’affaires des 15 principaux producteurs européens d’électricité a baissé en moyenne de 5 % et la rentabilité opérationnelle de 9 % sur la période 2013-2015.»

Reste que l’affectation des investissements vers le renouvelable – ou tout simplement la volonté de participer à la lutte contre le réchauffement climatique – exerce une incidence sur les autres types d’énergie. Comme le note Florian Ortega, des investisseurs institutionnels comme Axa, BNP Paribas ou Société générale ont décidé de réduire drastiquement leur exposition au charbon, voire de s’en affranchir complètement. «À partir d’une dynamique similaire, près de 20.000 emplois dans ce secteur ont été détruits aux États-Unis depuis 2012.»

En sens inverse, la transition énergétique booste la transition numérique qui sous-tend le développement des réseaux intelligents – nécessaires à l’intégration des énergies renouvelables. «L’association Think Smartgrids a calculé que le digital créerait 15.000 emplois en France d’ici à 2020, dans le double sillage du déploiement des compteurs communicants et de l’exportation d’un savoir-faire à l’étranger», précise encore le consultant. La transition énergétique peut donc avoir des effets vertueux sur l’emploi hors de ses frontières naturelles.

Un avenir en pointillé

Sur le front des emplois créés par la transition énergétique, les scénarios du futur dépendent beaucoup de la compétitivité des filières. Le photovoltaïque possède ainsi une longueur d’avance: «Non seulement les coûts baissent à une vitesse accélérée, mais c’est une énergie qui bénéficie de l’assentiment de l’ensemble des consommateurs, collectivités, entreprises et particuliers», souligne Jean-Louis Bal. Selon France Territoire Solaire, le think-tank qui regroupe la plupart acteurs du secteur, 25.000 emplois supplémentaires sont envisageables d’ici à 2023. «Une part de plus en plus importante des postes sont liés à la maintenance et constituent donc des emplois pérennes et non délocalisables», insiste Daniel Bour.

Le futur passe aussi par l’essor de filières encore embryonnaires, comme celle du gaz renouvelable. Actuellement, les 26 sites injectant du biométhane dans les réseaux ne couvrent que 0,05 % de la demande française, mais la loi de transition énergétique fixe à 10 % la consommation de gaz vert à l’horizon de 2030. Si cette montée en puissance se concrétise, les professionnels misent sur la création de 2000 à 3000 emplois directs à l’horizon de 2020. «Et si l’on considère la filière biogaz dans son ensemble, incluant l’injection et la distribution de biométhane carburant, on pourrait grimper jusqu’à 15.000 emplois en tout», souligne un industriel.

Indépendamment des grandes options énergétiques et technologiques, l’avenir de l’emploi dépend aussi du soutien des pouvoirs publics. Aujourd’hui, le renouvelable bénéficie d’un tarif de rachat mais que se passera-t-il quand les énergies vertes ne seront plus subventionnées? «C’est un faux problème, dès l’instant où une véritable fiscalité écologique est mise sur les rails, un cercle vertueux est recréé au profit de nos industries, répond Jean-Louis Bal, mais cela nécessite beaucoup de travail, à commencer par l’instauration d’un prix du carbone à l’échelon européen.»

En réalité, les partisans de la transition énergétique croient résolument en son dynamisme mais savent que les gains en termes d’emplois sont assortis de nombreuses conditions.

Frédéric de Monicault

 

::: POLITIQUE

LE FIGARO – 28/02/2017

L’industrie française, fragilisée, s’invite dans la présidentielle

INFOGRAPHIE – Les représentants de Fillon, Hamon et Macron sont auditionnés mardi devant plusieurs organisations patronales sur leur vision du futur du secteur.

«Reconquête industrielle: maintenant ou jamais!» C’est sur cette accroche que des fédérations patronales – industries mécaniques (FIM), industries textiles (UIT), fédérations industrielles (GFI) et entreprises de taille intermédiaire (METI) – invitent ce mardi des représentants des candidats à l’élection présidentielle à s’exprimer. Ceux de François Fillon, Emmanuel Macron et Benoît Hamon vont exposer la vision de leur champion sur l’industrie, la compétitivité et plus spécifiquement sur la fiscalité de la production. «Car nous sommes un des rares pays à être à ce point imposé, et ce n’est pas vertueux», souligne Vincent Moulin Wright, le directeur général du GFI.

Le secteur industriel connaît en effet, depuis trois décennies, un véritable déclin. Après avoir souffert dans les années 1990, l’industrie française a manqué le tournant de la mondialisation de son appareil productif, de la montée en gamme et de la robotisation au début des années 2000. Pénalisée par sa compétitivité, elle n’a que très peu profité des opportunités apportées par l’émergence des classes moyennes, en Asie notamment. La crise de 2008 n’a rien arrangé: les entreprises les plus fragiles n’ont pas survécu. Et les plans de réduction d’effectifs se sont accumulés.

Selon l’Insee, l’industrie manufacturière pesait 22,3% du PIB en 1970, contre deux fois moins en 2014. Certes, les entreprises industrielles ont externalisé une partie de leurs activités vers les services (R&D, marketing, distribution, nettoyage…), ce qui a fait sortir ces activités de la comptabilité manufacturière, et mécaniquement baisser le poids du secteur dans la richesse nationale. Mais cela n’explique pas tout.

Pourtant, l’industrie joue un rôle essentiel dans l’économie: elle produit toujours 266 milliards d’euros de richesse chaque année. Les produits industriels représentent plus de 96% des exportations. Et elle génère 76,6% du total des dépenses annuelles de R&D engagées par des entreprises, soit 23,5 milliards d’euros – contre 7,2 milliards pour le reste de l’économie. Enfin, l’emploi dans l’industrie a un effet multiplicateur: un emploi dans l’industrie génère trois à quatre emplois hors du secteur industriel.

Recul des parts de marché

Avec la mise en place du Crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE) ces dernières années, mais aussi le programme d’Industrie du futur, les entreprises ont retrouvé un peu d’oxygène. Leurs marges ont retrouvé leur niveau d’avant-crise. Selon COE-Rexecode, le coût salarial unitaire a augmenté moins vite en France sur la période allant de 2012 à 2016 (de 0,8%) que dans le reste de la zone euro (3,7%) et en Allemagne (9,1%). Mais cette amélioration de la situation ne s’est pas traduite par des gains de part de marché à l’international. La part des exportations françaises de biens et services parmi celles de la zone euro a reculé en 2016: elle s’établit à 13,4%, après 13,6% en 2015. Pour mémoire, elle était de 17% en 2000.

«Il y a eu beaucoup de zigzags et les bonnes choses qui ont été mises en place ont été abîmées par de mauvaises», souligne Vincent Moulin Wright, citant l’instabilité fiscale, la mise en œuvre du compte pénibilité ou l’alignement de l’imposition du capital sur celle du travail.

Marie Visot

 

 

LE FIGARO – 28/02/2017

Ce que proposent les candidats à la présidentielle pour sauver l’industrie française

Les représentants de plusieurs candidats exposent ce mardi leurs propositions pour redresser une industrie française fragilisée.

Les fédérations patronales – industries mécaniques (FIM), industries textiles (UIT), fédérations industrielles (GFI) et entreprises de taille intermédiaire (METI) – invitent ce mardi des représentants des candidats à l’élection présidentielle à s’exprimer. Tour d’horizon des principales propositions.

  • François Fillon: un engagement de stabilité fiscale

Le plan du candidat des Républicains s’articule autour de quelques grands axes. La suppression des 35 heures d’abord. Cette «utopie qui est restée une exception française» sera remise en cause: la loi fixera la durée maximale du «travail hebdomadaire selon la norme européenne», soit 48 heures par semaine. Les accords d’entreprise seront la norme et l’accord majoritaire s’imposera au contrat de travail. Cela«permettra de développer l’activité sans carcan juridique», plaide Fillon. La simplification du droit du travail devra aussi redonner de l’oxygène aux entreprises. Pour «rénover le dialogue social qui s’est progressivement complexifié», Fillon veut notamment relever les seuils sociaux de 10 à 50 salariés et de 50 à 100, et limiter le temps consacré au mandat syndical à 50 % du temps de travail. Parce que «les prélèvements fiscaux directs sur les entreprises sont deux fois plus élevés en France qu’en Allemagne», il compte enfin aligner le taux d’IS sur nos voisins, supprimer l’ISF et s’engager sur la stabilité fiscale une fois ces mesures prises. Mais aussi refondre la fiscalité du capital pour «réorienter l’épargne des Français vers l’investissement productif».

  • Emmanuel Macron: priorité à la compétitivité

Macron est très clair: «Il faut remettre l’industrie au cœur de notre économie, et l’homme au cœur de l’industrie.». Le candidat d’En marche! veut transformer le CICE en allégements permanents de cotisation pour les entreprises, ce qui «représentera 6 points de charges en moins au niveau du smic jusqu’à 2,5 smic». Le taux de l’impôt sur les sociétés (IS) sera ramené de 33,3 % à la moyenne en Europe, soit 25 %, en cinq ans. Macron mise aussi sur un plan d’investissement de 50 milliards, pour rehausser les compétences et la montée en gamme des entreprises. 15 milliards seront consacrés aux compétences des Français, avec un plan de formation des jeunes et des demandeurs d’emploi, et 15 autres milliards iront à la transition écologique et énergétique. Enfin, il veut donner la priorité à la négociation collective, dans les branches ou les entreprises, que ce soit sur la question du temps de travail ou des salaires. «Il faut  aller plus loin que la loi El Khomri» en matière de travail, dit-il.

  • Marine Le Pen: rétablir l’État stratège

C’est notamment par le protectionnisme que la candidate du FN veut soutenir les entreprises françaises «face à la concurrence internationale déloyale». Cela passe par l’interdiction de l’importation de produits provenant de l’étranger ne respectant pas les normes imposées aux producteurs français. Ou en «se libérant des contraintes européennes» et en réservant la commande publique aux entreprises françaises si l’écart de prix est raisonnable. Marine Le Pen veut créer un secrétariat d’État dédié aux mutations économiques, rattaché à Bercy «afin d’anticiper les évolutions des formes de travail liées aux nouvelles technologies (ubérisation, robotisation, économie du partage…)». Dans ce cadre, elle veut mettre en place «un plan de réindustrialisation associant l’industrie et l’État stratège pour privilégier l’économie réelle face à la finance spéculative». Le FN appelle aussi à une renationalisation des sociétés d’autoroutes. La candidate prévoit, par ailleurs, d’alléger la complexité administrative et fiscale pesant sur les PME, supprimer des contraintes liées aux seuils, abaisser les charges en fusionnant tous les dispositifs d’allégements existants ou encore créer un taux intermédiaire d’IS à 24%.

Vidéo : http://premium.lefigaro.fr/conjoncture/2017/02/27/20002-20170227ARTFIG00290-ce-que-proposent-les-candidats-a-la-presidentielle-pour-sauver-l-industrie-francaise.php

 

Marie Visot

 

 

L’OPINION – 28/02/2017

Présidentielle, le grand n’importe quoi fiscal

La fiscalité est sur le point de revenir le devant de la scène dans la campagne : les candidats cherchent « la » mesure à même de séduire l’électorat. La réflexion de fond sur le rôle de l’impôt, elle, a encore été oubliée par les écuries présidentielles

Taxer les robots, créer 14 tranches d’impôts sur le revenu, exonérer 80 % des Français de taxes d’habitation, créer une cotisation sociale sur les produits importés… Les principaux candidats à l’élection présidentielle rivalisent d’ingéniosité pour séduire leur électorat. Mais la mesure fiscale « choc », qui fait traditionnellement l’élection en France, n’est pas encore née dans cette campagne 2017. Une chance ?

C’était le 27 février… 2012. Il y a cinq ans. Le candidat François Hollande abattait une carte décisive contre Nicolas Sarkozy en annonçant, sur TF1, une taxe de 75 % sur les salaires supérieurs à 1 million d’euros. Surprise générale dans son camp, y compris chez son conseiller économique, un certain Emmanuel Macron, qui ironisait sur ce « Cuba sans le soleil ». Mais un coup de maître. Car à cette époque, le candidat socialiste voyait celui de la droite revenir dans son sillage et Jean-Luc Mélenchon lui rogner des voix sur son aile gauche. Dès le lendemain, et jusqu’au deuxième tour de l’élection, Nicolas Sarkozy n’a jamais réussi à refaire son retard.

« Tuer le match » de 2017 avec une proposition fiscale choc ? Personne n’en parle ouvertement dans les écuries mais tout le monde y pense. Emmanuel Macron a tenté sa chance la semaine dernière, avec sa proposition de réduire la taxe d’habitation pour 80 % des ménages français qui rappelle par son côté démagogique la taxe à 75 % de son ancien mentor. François Fillon y travaille très dur avec ses équipes dans l’espoir de se relancer, en fin de semaine lors de son meeting aux Docks d’Aubervilliers. Il cherche notamment une mesure pour séduire les classes moyennes. Mais à 54 jours seulement du premier tour, tout cela donne l’impression d’une grande confusion et laisse encore les sujets de fond de côté.

Aucun des candidats ne prend par exemple soin de rappeler que l’impôt est l’un des fondements de notre pacte social car, pour être consenti, il implique que le citoyen fasse confiance à l’Etat et aux autres contribuables. Le premier pour qu’il utilise bien l’argent collecté, les seconds pour ne pas qu’ils fraudent. Aucun ne propose une vision sur la fiscalité : sans doute le ras-le-bol fiscal éprouvé par les Français explique-t-il cette réticence. Aucun n’ose vraiment de même énoncer une règle de base : pour baisser les impôts de façon significative, il faut d’abord diminuer fortement les dépenses publiques. A vouloir éviter tous ces sujets, on ne risque pas de clarifier ni de simplifier notre système fiscal. Ni de lancer une grande réforme. Au contraire, les mesures qui figurent actuellement dans les programmes officiels allient, pour beaucoup, démagogie et contresens économique. L’Opinion en dresse un petit florilège.

Emmanuel Macron : exonérer 80 % des Français de la taxe d’habitation

Il risque de ne pas être très bien reçu, le 22 mars, à la maison de la Radio. Ce jour-là, les candidats ayant tous leurs parrainages plancheront devant près de 700 élus. Lesquels n’ont pas digéré l’annonce fracassante du candidat d’En Marche ! sur la taxe d’habitation, qui consiste à exonérer de cet impôt les ménages dont le revenu est inférieur à 20 000 euros annuels par part fiscale. L’Association des Maires de Frances (AMF) a aussitôt dénoncé une mesure « démagogique, non financée et attentatoire aux libertés locales ». Emmanuel Macron a pourtant affirmé que la mesure ne « coûtera rien aux collectivités locales » puisqu’elle sera à la charge de l’Etat, reprenant la formule de François Hollande à propos des emplois d’avenir. Mais les collectivités locales se méfient : le financement du RSA a montré que l’Etat ne compense pas toujours ses propres décisions. Si l’impôt est transformé en dotation, le risque est que les communes, opportunistes, augmentent le taux de cette taxe. Enfin, il faudra bien trouver 10 milliards par an en instaurant des hausses d’impôts pour d’autres contribuables. Emmanuel Macron veut aussi augmenter la CSG mais pas sur les revenus du capital, sur lesquels il prévoit un prélèvement libératoire de 30 %. Et aussi supprimer l’ISF, mais pas sur l’immobilier. Un peu compliqué.

Benoît Hamon : taxer les robots pour financer le revenu universel

C’est l’idée lancée par le candidat socialiste : prélever des cotisations sociales sur les robots qui remplacent les emplois peu qualifiés. Cette « manne » permettrait de financer le revenu universel cher au cœur de Benoît Hamon. « L’histoire économique nous montre l’hérésie de taxes frappant des objets plutôt que des sommes monétaires, rappelle Robin Rivaton, essayiste et membre du conseil scientifique Fondapol. Le jour où le Directoire, pendant la Révolution, a instauré une taxe sur les fenêtres comme taxe foncière, les citoyens les ont tout simplement murées. » Ensuite, les gains de productivité réalisés grâce aux robots sont déjà taxés par l’impôt sur les sociétés. Benoît Hamon souhaite aussi la création à l’encontre des GAFA [Google, Apple, Facebook, Amazon] d’une taxe qui serait « européenne ». Une menace bien vague. Enfin, il est question d’une incitation fiscale en faveur des exploitants qui cèdent leur entreprise à leurs salariés, réunis au sein d’une société coopérative ouvrière de production (SCOP). Modeste contribution au vaste problème que soulèvent les destructions d’emplois causés par le départ des fondateurs des entreprises.

Jean-Luc Mélenchon : taxer tous les Français partout dans le monde

Le candidat de La France insoumise prévoit 100 milliards de hausses d’impôts, ce qui ferait de la France le champion du monde incontesté des taux de prélèvements obligatoires à 49,1 % du PIB. Pourtant, une de ses intuitions est juste : pour être accepté, l’impôt doit être acquitté par tous les citoyens. Mais son « impôt universel » prévoyant 14 tranches d’impôt sur le revenu pour le rendre plus progressif aboutit à un coup de massue sans précédent. Avec certaines aberrations comme l’idée de taxer les Français résidants à l’étranger, sur le même modèle que les Etats-Unis. « Cela signifie modifier les 160 conventions fiscales reliant la France aux autres pays, à condition que ces derniers acceptent de le faire », résume Jean-Yves Mercier du Cercle des fiscalistes. Autres propositions du candidat, parmi les plus démagogiques : une taxe sur les produits de luxe, une nouvelle sur les transactions immobilières ou encore le durcissement de l’ISF.

Marine Le Pen : une contribution sociale sur les importations

Le programme fiscal de la candidate FN n’est pas le point le plus critiquable de sa politique économique. Il prend même acte de la colère des Français en promettant de baisser de nombreux impôts. Sauf sur deux points : Marine Le Pen propose elle aussi de réduire ou de supprimer la taxe d’habitation pour les ménages les plus modestes, « ce qui est un puits sans fonds pour les finances publiques », résume Jean-Yves Mercier ; mais surtout, elle souhaite instaurer « une Prime de Pouvoir d’Achat (PPA) à destination des bas revenus et des petites retraites [pour les revenus jusqu’à 1 500 euros par mois], financée par une contribution sociale sur les importations de 3 % ». Une telle taxe sociale sur les importations est non seulement impossible dans l’Union européenne mais dans l’hypothèse où la France opterait pour un « Frexit », il est très peu probable que cette contribution soit acceptée lors des indispensables traités commerciaux bilatéraux que notre pays aura quand même l’obligation de conclure.

François Fillon : pas de geste fiscal pour les bas revenus

Suppression de l’impôt sur la fortune, augmentation de la TVA, relèvement du quotient familial… le candidat de la droite a certes présenté un programme complet, basé sur de fortes économies de dépenses publiques, mais il a oublié les petits revenus. « Je pense que le programme de François Fillon est une caricature du libéralisme qui apparaît comme une purge patronale. C’est du Robin des bois à l’envers : prendre de l’argent aux pauvres pour le donner aux riches… », a même affirmé Alain Madelin, ancien ministre de l’Economie, qui fut pourtant un fervent défenseur du libéralisme. Fin janvier, il a tenté d’adoucir son programme, en affirmant notamment qu’il n’y aurait pas que du sang et des larmes dans sa réforme des retraites. « Toutes les pensions du régime de base inférieures à 1 000 euros augmenteront de plus de 300 euros par an », a-t-il ainsi déclaré. Le coup de pouce de François Fillon, distribué en sifflet entre 800 et 1 200 euros, concernerait 4 millions de Français. Cette mesure serait financée par les économies à venir avec le relèvement de l’âge légal de départ à la retraite à 65 ans. Il pourrait aussi différer dans le temps les hausses de TVA. Pas sûr que cela suffise à « casser » son image de candidat des riches. D’autant que la fin des 35 heures et l’allégement des charges des entreprises le font pencher clairement du côté de celles-ci plutôt que de celui du « peuple ».

Irène Inchauspé et Cyrille Lachèvre

 

 

LES ECHOS – 28/02/2017

Benoît Hamon plaide pour un moratoire sur la dette française

Le candidat du PS se dit prêt à un bras de fer avec l’Allemagne pour réformer la zone euro.

Benoît Hamon célèbre à sa façon les vingt-cinq ans du traité de Maastricht. Le candidat du PS à la présidentielle milite pour une refonte complète des règles européennes, qui mettrait fin au sacro-saint seuil des 3 % de PIB pour le déficit public et aboutirait à un moratoire sur une partie de la dette. Interrogé lundi sur France Inter, il a fustigé la « barre des 3 % » comme étant un « non-sens » : « Cela ne répond pas aux besoins d’une économie comme la nôtre. » Classique au sein de la classe politique française, cette diatribe contre les 3 % s’est accompagnée d’une menace plus inhabituelle, évoquant à demi-mot une restructuration de la dette française : « Il faudra regarder ce qu’on pourra rembourser ou ne pas rembourser. Il y a une dette vis-à-vis de la planète que nous ne pouvons pas rembourser. Il y a une dette vis-à-vis des banquiers que nous pouvons tout à fait renégocier », a-t-il affirmé.

Priorité à la croissance

Une telle sortie ira sans doute droit au coeur du Premier ministre grec, Aléxis Tsípras, que Benoît Hamon prévoit d’aller voir à Athènes. Elle témoigne surtout de l’infléchissement du programme européen du candidat depuis qu’il travaille avec Thomas Piketty. L’économiste milite pour la mise en place d’un parlement de la zone euro chargé de coordonner les politiques budgétaires des Etats utilisant la monnaie unique. « Le Pacte de stabilité et ses critères automatiques, comme la règle des 3 %, ont connu un échec patent durant la crise, aboutissant à casser la reprise européenne en 2011-2013 », explique Thomas Piketty aux « Echos ».

Celui-ci plaide donc pour donner les clefs à une assemblée où siégeraient des représentants des parlements nationaux à due proportion de leur poids dans la démographie européenne : la France, l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne obtiendraient 76 % du total. Ce Parlement de la zone euro serait chargé de décider du niveau de consolidation budgétaire pour chacun des pays. « Nous espérons que cette assemblée pourra nous faire sortir de l’austérité. L’objectif est d’obtenir un moratoire sur la règle des 3 % et de donner la priorité à la croissance sur les déficits », indique Thomas Piketty.

Dans la vision du candidat socialiste, une telle réforme servirait également à la mutualisation de la partie des dettes publiques européennes dépassant le niveau de 60 % du PIB. « Avant de rembourser la dette, il faut retrouver un niveau de production de richesse suffisant. Compte tenu du niveau de dette en Europe du Sud, mais aussi dans d’autres pays comme la France, dire que l’on va s’en sortir sans moratoire en consacrant au remboursement 2 % à 4 % d’excédent budgétaire pendant cinquante ans, cela ne tient pas la route », estime l’économiste.

Dans l’attente de ce grand soir, Benoît Hamon se prépare à une épreuve de force dans l’éventualité de son élection. « En 2017, nous nous affranchirons du Pacte de stabilité de façon raisonnable pour financer la croissance », avance Thomas Piketty, qui sait que sa réforme va susciter des frictions avec Berlin. « Les choses doivent changer, et cela peut passer par un bras de fer avec l’Allemagne. Si celle-ci dit « non » à la démocratisation, cela aboutira de facto à la fin de l’euro », prévient-il.

Renaud Honoré

 

::: INTERNATIONAL

LA TRIBUNE – 28/02/2017

Brexit : l’Ecosse osera-t-elle un référendum unilatéral sur l’indépendance ?

 

L’Ecosse divorcera-t-elle sans consentement de Londres du Royaume-Uni ?

 

Theresa May refuse tout nouveau référendum écossais sur l’indépendance. Mais les Nationalistes écossais pourraient passer outre. Non sans problème.

Le gouvernement régional écossais se retrouve désormais dans une situation « à la catalane ». Depuis le 23 juin et le vote britannique en faveur de la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne (le « Brexit »), le gouvernement écossais, dirigée par le Parti Nationaliste Ecossais (SNP), évoque la possibilité d’un second référendum sur l’indépendance. L’Ecosse a en effet massivement soutenu le maintien dans l’UE à 62 % le 23 juin, alors que l’ensemble du Royaume-Uni votait en faveur du Brexit à 51,7 %. La Première ministre écossaise, Nicola Sturgeon, a défendu l’idée d’un respect du choix des Ecossais et donc d’un maintien, d’une façon ou d’une autre, dans l’UE. Même au prix, avait-elle dit d’emblée, d’un nouveau référendum sur l’indépendance.

Le 18 septembre 2014, les Ecossais avaient choisi à 55 % de demeurer dans le Royaume-Uni. La crainte de se voir « expulser » de fait de l’UE avait joué un rôle fondamental dans ce résultat. Le SNP avait accepté l’issue du scrutin et avait enterré provisoirement l’idée d’un nouveau référendum « sauf en cas de changement majeur de circonstances ». Nicola Sturgeon considère que le vote en faveur du Brexit constitue un de ces changements et qu’il convient donc de consulter à nouveau le peuple écossais.

L’effet « hard Brexit »

La décision du gouvernement britannique dirigé par Theresa May le 17 janvier de préférer le contrôle des frontières au maintien dans le marché unique, autrement dit de privilégier un « Brexit dur », a encore alimenté la détermination de Nicola Sturgeon qui avait alors jugé que ce « hard Brexit rapprochait l’Ecosse d’un nouveau vote » sur la sécession. Cette colère n’avait, du reste, été que renforcée par une autre décision, celle de la Haute Cour, qui avait confirmé que l’accord des parlements des régions aux pouvoirs dévolus (Ecosse, Pays de Galles et Irlande du Nord) n’était pas nécessaire dans le processus de séparation avec l’UE.

Le problème de la légalité de la voie unilatérale

Mais ce deuxième référendum pose de nombreux problèmes. Le premier est sa légalité. En 2014, le vote sur l’indépendance avait été le fruit d’un processus de négociation entre Londres et Edimbourg. Le gouvernement britannique avait validé le vote et s’était engagé à en reconnaître le résultat en engageant des discussions de deux ans pour achever la séparation. Mais, cette fois, un tel accord est improbable. Dimanche 26 février, la première ministre britannique Theresa May a confirmé qu’elle ne voulait pas d’un nouveau référendum sur l’indépendance. « Il y a eu un référendum. Il était clair, décisif et légal. Les deux parties ont accepté de reconnaître le résultat de ce référendum », a indiqué la locataire du 10, Downing Street. Autrement dit, Theresa May estime que la question de l’indépendance écossaise est close. Elle peut compter sur le soutien sur ce point du chef du parti travailliste, Jeremy Corbyn, qui a demandé au SNP ce week-end de « respecter » le résultat du Brexit et d’abandonner la « folie » de l’indépendance.

L’Ecosse comme la Catalogne

Nicola Sturgeon ne peut donc compter sur un processus comparable à celui de 2014. Elle va devoir choisir entre se soumettre à la légalité britannique, renoncer à l’indépendance et accepter le Brexit négocié par Londres ou se lancer dans un référendum unilatéral qui ne sera pas reconnu par le Royaume-Uni, mais sans doute pas davantage par la plupart des Etats de l’UE – ce qui risque de mettre en cause la capacité d’une Ecosse devenue ainsi indépendante à retourner dans le giron européen. Choix délicat, donc, qui, d’une certaine façon, était celui des Indépendantistes catalans voici quelques mois avant que ces derniers décident de se lancer dans un processus unilatéral avant le mois de juillet 2016.

La voie unilatérale pose de nombreux problèmes : celui de la reconnaissance international, du risque de conflit avec l’Etat central et de l’absence de participation des opposants à l’indépendance – donc de légitimité. Nicola Sturgeon peut-elle se lancer dans un tel processus ? En Catalogne, les Indépendantistes disposaient d’un mandat pour préparer l’indépendance et d’une majorité parlementaire. Leur décision n’en est pas moins contestée en Espagne où plusieurs dirigeants catalans sont poursuivis par la justice pour leur décision d’aller vers l’indépendance catalane.

« Nouveau référendum » ?

En Ecosse, Nicola Sturgeon peut en théorie s’appuyer sur une majorité indépendantiste en s’alliant avec les Verts écossais, qui sont favorables à la sécession, mais cette alliance sur un référendum est à construire puisque l’indépendance n’a pas été au cœur de la campagne des élections régionales de mai 2016. Certes, Nicola Sturgeon peut construire la légitimité de son référendum sur l’éclatement du statu quo le 23 juin dernier. C’est ce qu’elle tente de faire, notamment en demandant, selon le quotidien The National, à ces conseillers de ne pas parler de « second référendum » mais de « nouveau référendum » puisque les conditions sont différentes. « C’est un nouveau référendum parce qu’il s’agit d’une question de déficit démocratique et de sortir, contre notre volonté de l’UE », a indiqué aux dirigeants SNP la première ministre. Mais c’est un fondement fragile face à l’absence de légitimité.

L’UE au bout du chemin ? Pas si sûr

Surtout, Nicola Sturgeon doit redouter la réaction de l’UE elle-même. Les Européens sont confrontés au refus de l’Espagne et de la France de prendre en compte la demande de l’Ecosse d’une réintégration immédiate d’une Ecosse indépendante dans l’UE. Cette perspective avait été envisagée plus ou moins clairement après le 23 juin par la Commission européenne, puis par certains négociateurs européens comme l’ancien premier ministre belge Guy Verhofstadt, afin de faire pression sur Londres dans les discussions sur le Brexit. Mais, pour Madrid, ce serait un désastre car un tel processus légitimerait une sécession unilatérale et rendrait impossible le rejet du processus catalan en cours. Un des arguments du gouvernement espagnol contre l’indépendance catalane sera l’éjection d’une république catalane indépendance de l’UE en cas de sécession. L’UE a dû se plier à ces craintes.

Dans le Financial Times de ce 27 février, la Commission fait savoir que l’Ecosse devra postuler à l’adhésion, comme tous les autres candidats, en cas d’indépendance. Certes, Bruxelles reconnaît que la procédure « sera plus rapide », puisque l’Ecosse est sans doute plus proche de l’UE que d’autres pays candidats, mais elle devra se soumettre à toute la procédure qui, en réalité, est toujours longue. Et surtout, la question principale reste en suspens : une indépendance unilatérale pourrait-elle enclencher ce processus ? L’UE devra reconnaître cette indépendance. Et si l’indépendance de l’Ecosse est reconnue via un référendum unilatérale, pourquoi refuser cette reconnaissance à la Catalogne ? Madrid, immanquablement, pour maintenir l’isolement de la Catalogne, bloquera l’adhésion écossaise…

Majorité des Ecossais contre un nouveau référendum

Autrement dit, Nicola Sturgeon ne pourra pas faire miroiter facilement le retour dans l’UE au bout de son référendum d’indépendance… C’est donc l’argument principal du SNP qui est fragilisé. Certes, la brutalité de Londres, qui ignore la spécificité écossaise dans le processus du Brexit, joue en faveur de l’indépendance. Selon les sondages, l’indépendance est certes encore minoritaire, mais elle a beaucoup progressé dans l’opinion écossaise depuis la décision d’un « hard Brexit » de Theresa May. Néanmoins, selon la dernière enquête, 51 % des Ecossais pensent qu’il ne faut pas convoquer un nouveau référendum, contre 44 % qui sont de l’avis contraire. Le Brexit ne semble donc pas une circonstance décisive pour la majorité des Ecossais pour revenir sur leur vote de 2014. Tout le travail de Nicola Sturgeon sera, si elle veut parvenir à l’indépendance, de changer cet état d’esprit. Pour cela, elle peut sans doute compter sur l’inflexibilité de Theresa May et du Labour. Car une des leçons de la Catalogne, c’est que la cause de l’indépendance ne progresse jamais tant que quand le pouvoir central fait mine d’ignorer la spécificité d’une région tentée par la sécession et mise sur une forme de mise au pas et de mépris.

Romaric Godin

 

 

LE PARISIEN – 28/02/2017

Trump face au casse-tête de l’Obamacare

 

Denver (Etats-Unis), le 7 février. Manifestation pour le maintien de l’Affordable Care Act.

ÉTATS-UNIS. C’est aujourd’hui que le nouveau président doit préciser comment il gomme la grande réforme santé de son prédécesseur. Problème : les Américains n’y sont plus si hostiles…

Après les décrets anti-immigration, c’est une autre de ses promesses phares que Donald Trump va mettre sur le métier : la réforme de l’Obamacare. C’est lors d’un discours prononcé aujourd’hui devant le Congrès (Parlement américain) que le 45e président des Etats-Unis précisera s’il « détricotera » ou abrogera purement et simplement cette loi emblématique de l’ère Obama. L’Affordable Care Act (loi sur la santé abordable), son nom exact, a permis à 20 millions d’Américains aux revenus modestes de bénéficier d’une couverture santé, faisant ainsi chuter le nombre de personnes sans assurance de 16 % en 2010 à 8,9 % l’an dernier.

Une avancée gigantesque dans un pays où, à moins d’être presque sans ressources (on touche alors les aides publiques du Medicaid) ou de travailler dans une entreprise qui prend en charge la couverture maladie, se soigner peut vite s’avérer un luxe inabordable.

Depuis son entrée en vigueur en 2010, l’Obamacare a nourri une hostilité qui a fait en partie le lit de Donald Trump — qui l’avait qualifié de désastre pendant la campagne présidentielle. Philosophiquement, cette réforme était, pour beaucoup de républicains libéraux, synonyme d’ingérence de l’Etat fédéral dans la vie des Américains. Pis ! l’Obamacare a fini par provoquer des hausses de 25 % en moyenne des primes d’assurance, ce qui a renforcé la colère de ses détracteurs. « L’élection de Donald Trump s’est en grande partie jouée sur le rejet de l’Obamacare, souligne un spécialiste des Etats-Unis. Ce qu’il va proposer devant le Congrès va avoir un impact déterminant sur l’ensemble de son mandat. »

Or, depuis que Trump a juré d’aller vite, l’opinion a sensiblement évolué sur le sujet. Certains élus républicains, qui doivent gérer et financer partiellement les dossiers des bénéficiaires de l’Obamacare, réalisent localement les effets pervers d’une telle refonte. Que vont devenir ceux qui bénéficient déjà de la couverture santé ? Comment vont évoluer les primes ? L’inquiétude est partagée par les assureurs et les hôpitaux. Sondage après sondage, une majorité d’Américains expriment désormais leur souhait de conserver ce totem des années Obama. Les « vétérans » viennent ainsi de publier une vidéo sur le site VoteVets, dans laquelle un soldat amputé d’une jambe lors d’une mission en Afghanistan accuse Trump de le priver des aides dont il bénéficiait. « Vous avez perdu le soutien populaire, et votre popularité continue de s’effondrer, assène-t-il. Ce n’est pas l’Amérique pour laquelle je me suis sacrifié. »

Donald Trump se retrouve donc dans l’embarras. Il pourrait assouplir quelques dispositions clés de l’Obamacare, comme l’obligation individuelle d’être assuré ou celle, pour les entreprises de plus de 50 salariés, de fournir une assurance santé. Il devrait aussi réduire la couverture maternité ou de maladies mentales. Il conserverait, en revanche, la mesure — plutôt consensuelle — permettant aux enfants de bénéficier de la couverture maladie de leurs parents jusqu’à 26 ans ainsi que l’interdiction pour un assureur de refuser un patient en raison de son état de santé.

L’abrogation de la loi, déclinée de façon singulière dans chacun des 50 Etats du pays, s’avère extrêmement complexe. Même si Trump ne devait pas abroger entièrement la loi, le retrait ou la réécriture de certains articles demandera du temps et un sens politique aigu.

Bush lui fait la leçon

George W. Bush, président des Etats-Unis entre 2000 et 2008, ne sort pas souvent de sa paisible retraite texane. Mais quand il le fait, aïe ! Hier, sur la chaîne NBC, l’ancien et très controversé leadeur a donné une leçon de démocratie à Donald Trump, républicain comme lui, mais dont il supporte mal les incessantes attaques contre les médias, qualifiés « d’ennemis du peuple américain ». « Ils sont indispensables pour que des gens comme moi aient à rendre des comptes », a lâché Bush, devenu… peintre. Le 43e président des Etats-Unis, régulièrement éreinté par la presse américaine (et mondiale) quand il était à la Maison-Blanche, a ajouté que « le pouvoir peut être très addictif et corrosif, et il est très important que les médias demandent des comptes à ceux qui abusent du pouvoir ».

Pour en savoir plus : http://www.leparisien.fr/international/trump-face-au-casse-tete-de-l-obamacare-28-02-2017-6718203.php

 

Jannick Alimi

 

 

 

Vous souhaitant une bonne journée.

 

Cordialement,

 

 

Elena NATALITCH

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